10/07/2010

Cria cuervos, film sublime sur l'enfance


« Cria cuervos, y te arrancaran los ojos », « Élève des corbeaux et ils t’arracheront les yeux », ainsi est connu le proverbe espagnol. Les enfants seront toujours des ingrats si l’on ne tient pas compte de la façon dont on les élève. Carlos Saura a fait  une fable sur l'enfance dans une Espagne franquiste et bourgeoise cloisonnée dans ses codes et ses interdits. Ana, le personnage principal, pense qu'elle a le pouvoir de faire revivre sa mère par la seule force de ses souvenirs. Mais aussi celui de faire mourir son père qu'elle juge responsable de la mort de sa mère et sa tante qui ne réussit pas à remplacer sa mère.C’est un film sur la mort, trois morts frappent la vie d’Ana. Ana perd son père, sa mère et son cochon d’inde. Tout se passe dans un univers féminin, les hommes du film, des militaires franquistes ne brillent pas.
Dans sa vie d’écolière, de période de latence, Ana observe les adultes, les écoute, les imite.Dans la répétition du jeu d’enfant, elle se construit, se sépare des rituels de la vielle Espagne, elle représente la « Nueva España », Cria cuervos est sans doute un film politique, mais aussi cette magie qui transmet Saura nous renvoie à notre propre enfance, à notre solitude et à cette impasse de la sexualité infantile chez la fille après la dissolution de l'Oedipe. Il est difficile pour Ana de quitter son premier objet d'amour, sa mère étant donné que son père est un homme abject. Ana a des pulsions "assassines" selon Saura. Belle métaphore de la résolution oedipienne.